Une ville, ce sont des remous et des remugles, ce sont des crayonnés sales.
La ville est vivante, ce qui implique des zones mortes : ce sont les chancres urbains. Ou ce sont de toutes petites traces de mort qui ternissent le cristal de la ville : une façade décrépite, un mur abandonné, le gris abominable du béton qui envahit tout et que la pollution contribue en plus à noircir.

Depuis 2002, un projet nommé « Paliss’art » a vu le jour à l’initiative de l’Echevinat de l’Urbanisme, de l’Environnement, du Tourisme et du Développement durable : ouvrir l’espace public au « street art », donner la possibilité aux graphistes de déployer leur vocabulaire sur tous les supports, pourvu qu’ils soient dégradés et qu’un bain de couleurs soit nécessaire à leur embellissement (murs, façades, palissades, et autres).

Il s’agit d’une « opération », d’un travail de métamorphose. La ville s’est dotée avec beaucoup d’intelligence et comme cela se fait partout en Europe d’un processus intégré aux soubresauts de la vie urbaine, à ses hauts et ses bas.

Dans les interstices du développement urbain, aux points de fracture, à la charnière de son élan vital, là où ça craque, se fissure, se met à branler, à sentir mauvais, là où l’esthétique est battue en brèche, des artistes ont trouvé une place où s’exprimer. Et c’est surtout la couleur qui prédomine.

Paliss’art a aujourd’hui 15 ans d’existence et un album de quelque 60 œuvres, certaines éphémères, d’autres permanentes. Récemment, en 2016, à l’occasion des fêtes du 15 août, pour le 240ème anniversaire du Royal Bouquet de la République Libre d’Outremeuse, une fresque de 180 mètres carrés a été réalisée par le collectif « Spray Can Arts ». Depuis 2016 aussi, rue Varin, sur le mur du dépôt de la Ville de Liège qui longe la nouvelle gare des Guillemins, on peut admirer une œuvre inspirée de l’iconographie médiévale de 2 m de haut sur 25 mètres de longueur. Et c’est encore le collectif « Spray Can Arts » qui a inauguré au mois de mai dernier, pendant l’exposition « Révolution bande dessinée » au Musée de La Boverie, une autre fresque. Celle-ci est signée par les artistes Soke et Michaël Nicolaï et est dédiée à l’artiste et auteur de BD Enki Bilal. La façade qui a été peinte se situe à côté du Pont d’Amercoeur, au croisement entre le Quai du Longdoz et la rue Basse-Wez.

Philippe Adam

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